Bonjour à tous,
J'ai un peu déserté ce blog. Je m'en excuse. Toujours la même rengaine comme justification : le dehors a les dents. De grooooossses dents. Et quand on est occupés à traquer le CFA, on n'a pas toujours le temps et l'inspiration de venir s'extasier sur les merveilles du Cameroun. C'est trop chaud actuellement.
Ou bien je fréquente seulement les milieux de ngueme oooh?! Ou alors j'ai choisi la mauvaise vocation?? Parce que pendant que je triture mon cerveau à tenir une activité économique pérenne, que mes potes businessmen et moi on pleure à cause de la difficulté de la vie, les vendeuses de piment font le tour du monde en première classe. Breeeeef, chassons l'aigreur, chassons l'aigreur, elles font un métier difficile dans lequel je n'ai de toutes les façons pas les "arguments" pour réussir...
Alors, ce week-end, un de mes meilleurs amis s'est marié. Bien sûr, ce n'est pas le premier d'entre eux à le faire. Ni le dernier d'ailleurs. Et plus d'une fois j'ai eu à participer à l'organisation. La fête était belle, nous étions contents à la fin. Mais....Ce week end m'a rappelé pourquoi j'ai toujours eu une position d'anti-conformiste sur l'organisation des mariages.
Depuis plusieurs années, quand on me demande comment j'envisage mon propre mariage, je réponds toujours : mon chéri et moi, seuls à Las Vegas. Budget : 5000 euros, soit trois millions de francs CFA, tout inclus y compris les billets d'avion (depuis la France), une location d'hélicoptère qui survolerait le Grand Canyon, se poserait au fond pour nous permettre de boire du champagne et de danser sur un son de Petit Pays sous l'oeil vigilant du Grand Manitou. Mariage et lune de miel jumelés, moins les tracasseries liées à la gestion des personnes lors d'un mariage "normal" au Cameroun. Moi et ma personne face à notre destin. Un délire? Non, du tout. Un plan très réaliste et réalisable.
Bien sûr, on me rie au nez. On me demande si je pense que je vais boire le champagne des autres et danser jusqu'au matin pour les jongler lorsque mon tour arrive. On se dit que je blague. C'est presque le cas. Presque....Bref. On n'y est pas.
Voici les TROIS grandes leçons que j'ai retenues de tous les mariages auxquels j'ai participé. Les déjà mariés n'ont qu'à me dire à quel point je me trompe.... et vous comprendrez ma position!
1- On mange mal avant le mariage, on mange très mal après.
Bien sûr c'est chacun qui fixe son budget. Celui qui décide de se marier à un budget de trois cent mille francs CFA est libre de s'arrêter à ce budget là. Mais j'ai constaté de nos jours que tout le monde veut avoir son mariage de rêve. N'oubliez pas, on ne se marie qu'une fois (théoriquement). Et même les plus prévoyants ont du mal à appliquer une politique stricte leur permettant de manger normalement avant et après.
Quand on veut faire comme tout le monde, on pense mairie-église-vin d'honneur-soirée. Et quand on fait les comptes, la classe moyenne commence à comprendre qu'il faut prendre l'élan pour l'histoire là. Les mines se ferment, les dents se serrent, et les comptes en banque commencent à se vider. Tout l'argent passe dans l'organisation du mariage. La location de la salle... le traiteur....la boisson... le vin et le champagne pour les bobos.... les tenues.... le DJ....
Les chiffres s'enchainent. Les dépenses s'accumulent. Plusieurs millions au bas mot... MILLIONS... pour quelqu'un qui se réclame de la classe moyenne. L'année dernière, j'ai vu un ami maigrir progressivement avant son mariage. En fait il accompagnait son compte bancaire dans une cure d'amaigrissement.
Certains ont la chance d'avoir des parents qui ont attendu toute leur vie leur mariage. Des parents prêts. Si, si, il y a des parents qui sont comme des magiciens. Dès que l'enfant parle de se marier, ils démontrent qu'ils n'ont pas travaillé toute leur vie pour rien et l'argent apparait comme par enchantement. Quand on a ce genre de parents, il faut leur dire merci. Le revers de la médaille c'est que sur 400 invités, ils en auront peut être 350.
Pour les autres, les futurs mariés doivent commencer à épargner méchamment pour arriver à gérer. Parfois même s'endetter auprès de la banque ou des amis.
Les lendemains des mariages sont donc loufoques. On est content d'avoir passé un bon moment avec la famille et les amis généralement, mais on espère très fort que quelques invités bien avisés ont laissé tomber les verres, assiettes et autres accessoires de déco, cadeaux incontournables, pour faire un chèque en bonne et dûe forme. Ah oui, oui, ENEO ne sait pas que tu viens de te marier et t'a envoyé sa facture. Ton frigo te regarde. Tu peux encore gérer quelques jours avec les restes du mariage, sinon il y a toujours du tapioca dans les placards. Ça peut être tellement fort que tu songes très sincèrement à vendre la moitié des verres qu'on t'a offerts à un bar pour renflouer les caisses.
Bref, le mariage RUINE.
2- On a toujours de nouveaux ennemis après le mariage
Il y a les oubliés de la liste d' invités..... La première liste est souvent à 1000 personnes par là. Puis on se rappelle qu'on doit faire manger tout ce monde là. A ce moment on commence à raboter à gauche et à droite pour revenir à des chiffres en accord avec la profondeur de nos poches. Au cours du processus, il y a des gens qui sont retirés de la liste qui par la suite vont prendre pour un affront personnel le fait de ne pas avoir été invités. I-N-E-V-I-T-A-B-L-E.
Il y a aussi les gens qui n'ont pas été reçus à la hauteur de leur rang.... Les Camerounais sont des êtres très susceptibles et la susceptibilité augmente avec les cheveux blancs. "On m'a mis sur une mauvaise table". "On ne m'a pas servi assez de vin". "Ma table est allée au buffet en dernier" "On m'a fait asseoir avec Atangana. Donc Atangana et moi on est du même niveau??" "on m'a accueilli comme quelqu'un qui n'est rien". Etc...Etc...
Toutes ces frustrations leur passent généralement après quelques années...ou quelques bières, suivant l'importance qu'ils donnent à leur propre personne. Dans tous les cas, à défaut de faire plaisir à tout le monde, peut être qu'il vaut mieux alors fâcher tout le monde et faire son truc en solo.
3- Il y a une conspiration pour rendre les mariés fous
Je ne me souviens pas d'un seul mariage où les mariés n'ont pas été obligés de jouer aux équilibristes pour éviter de frustrer l'une ou l'autre des familles. C'est toujours l'occasion de la guerre des tranchées et c'est à la limite du dramatique lorsqu'il s'agit d'un mariage inter-tribal. Je ne parle même pas de la partie qu'on appelle "dote" là, qui mériterait bien à elle seule tout un article.
Ça commence parfois par les parents qui oublient que ce n'est pas leur mariage et qu'il ne faut pas qu'ils imposent ce qu'ils veulent. Exercice très compliqué pour les futurs mariés que d'arriver à gérer les choses à leur façon quand un des parents a décidé que ça doit se dérouler comme il l'entend. Ça peut partir de tout et n'importe quoi. Tiens la belle-mère d'une amie n'est pas venue au mariage de son fils, parce que ce dernier a décidé avec sa femme que le mariage aurait lieu à Douala où ils vivent tous les deux, plutôt qu'à Yaoundé où elle préférait qu'il ait lieu. D'autres ont dû organiser la mairie au village pour faire plaisir à une des mamans. Un autre mariage a été bloqué pendant des mois parce que la famille du marié estimait qu'il devait vivre après avec son épouse dans la concession familiale avec ses oncles et ses tantes, alors que les mariés avaient prévu de s'installer dans un appartement ailleurs. Oui, nous sommes bien au 21ème siècle.
Il faut souvent beaucoup de force de caractère et de volonté aux mariés pour rester soudés dans la préparation du mariage face à leurs familles respectives. Finalement, c'est un excellent test, car dans ce foutu pays, eh bien, c'est ça : Tu es marié à ta personne, mais c'est la terre entière qui estime avoir le droit de vous dire ce que vous avez à faire.
Le deuxième volet de ce point concerne les désordonnés qui veulent quand même gérer des points cruciaux du mariage. Il y a toujours un responsable de commission de la famille qui va ndem à un moment. Je ne sais pas pourquoi, mais c'est une constante. Quelque soit le talent présent dans la famille, il y a toujours CE cousin/oncle/père à qui on va confier quelque chose qui va s'oublier à un moment... Disparaitre au moment où on a le plus besoin de lui, faire le contraire de ce qu'on attend de lui, etc...
Les mariés sont stressés avant le mariage. Stressés pendant. La délivrance ne vient qu'à l'instant où tout est derrière eux.
Quand je prends ces trois grands points, j'en arrive toujours à la même question : est ce que ça en vaut la peine?
Oui, me dira-t-on.
Encore une fois, c'est pour la vie. Ce sont des moments inoubliables, des photos qu'on encadre et qu'on met dans son salon, des histoires qu'on raconte à ses enfants.
Le mariage, n'a rien d'une affaire entre deux adultes qui se gère à deux. Que ce soit la cérémonie, ou l'Union en elle. C'est l'affaire de tout le monde.
Et puis c'est l'Afrique, le Cameroun, c'est chez nous, c'est comme ça.