jeudi 7 mai 2020

Personnel hospitalier et Enseignants : ces sacrifiés....


Tous les métiers ont beau être importants, il y a des corps qui méritent encore plus de respect et de considération que les autres, en raison de l'importance de leur tâche et de leur impact sur notre présent et notre avenir. Il s'agit pour moi du personnel médical, des enseignants et des militaires.

Je tiens à préciser que je parle des militaires dans le sens général, ceux qui protègent leur pays et ses citoyens,  avec humanisme, dans le respect strict des règles de déontologie de l'armée. C'est important de le souligner, car il y a des évènements au Nord-Ouest, au Sud-Ouest et dans le Nord Cameroun, qui poussent à se poser des questions.... que je ne me poserai pas dans cet article ci. J'introduisais juste, car en réalité je veux parler du personnel médical et des enseignants, deux corps qui en voient des vertes et des pas mures en ce moment.

Les médecins, infirmiers et autres nous soignent. C'est grâce à eux que nous pouvons prétendre à conserver ou recouvrer la santé, et donc évoluer dans nos vies et avancer dans nos projets. Les enseignants, eux, forment notre avenir. Le savoir est une arme, et ils sont ceux qui le distillent. Qu'y a t il de plus important que la santé et le savoir??? Pourtant dans le contexte actuel de crise sanitaire liée au covid-19, je constate que ce sont les paillassons de cette société. Le mot peut sembler dur, mais c'est vraiment mon ressenti.

Les hôpitaux sont saturés dans la plupart des pays, et le personnel médical en première ligne, est très exposé et compte aussi ses propres morts. Le Cameroun ne fait pas figure d'exception.
Les médecins, infirmiers et autres personnels hospitaliers sont donc très exposés au virus dans l'accomplissement de leur mission. Sont-ils suffisamment protégés? La réponse est non. Faites un tour dans les hôpitaux, y compris ceux qui ont été désignés pour gérer les cas de Covid si vous en avez le courage, et observez le matériel de protection à leur disposition. Il n y en a clairement pas assez. Vous me direz, la polémique est la même en France, et nos spécialistes du nivellement par le bas ne manqueront pas de sauter sur l'occasion pour dire qu'il n y a aucune plainte à émettre à ce sujet. Mais quand même...

Au delà du problème de matériel, il y a celui de la rémunération. Personnellement, j'aurais bien été incapable de faire un minimum de sept ans sur les bancs d'école pour me retrouver en train de vadrouiller de garde en garde pour joindre les deux bouts, avec un salaire aussi bas que celui de nos fonctionnaires médecins. N'en parlons pas des infirmiers. Je me souviens avoir été vraiment ébahie par le niveau de revenus d'une amie infirmière libérale en France. Ici, que gagnent les infirmiers? A ce problème ce base, se rajoute celui du risque auquel ils sont exposés dans cette guerre dont ils sont les premiers soldats. Y a t il une prime de risques? A combien s'élève-t-elle? Est-elle régulièrement versée? Questions pour un champion. En attendant la réponse, les quelques médecins avec qui j'échange ont développé un cynisme et une amertume à nul autre pareil.

Le médecin est celui qui est en contact avec le malade et sa famille. C'est lui qui doit expliquer qu'il n y a pas de tests pour confirmer le statut du patient. C'est lui qui doit expliquer qu'il manque de la place, du matériel, des médicaments. Tout devrait être gratuit, mais c'est encore lui qui devra annoncer qu'il faut payer quelque chose, vu que la subvention promise par l'Etat n'est jamais arrivée et que les caisses de l'hôpital sont vides. C'est lui qui annonce les décès. C'est lui qui annonce que le corps est saisi. C'est lui qu'on va tabasser quand les choses ne seront pas allées dans le sens de ce que la famille veut. C'est facile : la profession ne semble plus rien avoir de sacré. On a trop souvent dépeint les médecins comme des clochards mercenaires qui ne sont intéressés que par l'argent. Ce genre d'individus, on les redresse dans la brutalité, pour beaucoup. Et la boucle est sans fin : ils sont frustrés, face à une population frustrée elle aussi, qui les tient pour responsables. Pourtant, les vrais responsables, on les connaît....

Qui a envie de travailler dans des conditions où il côtoie l'inconnu, un inconnu potentiellement mortel, sans être suffisamment protégé, sans être bien payé, sans être respecté? C'est là qu'on me parlera de "vocation". C'est vrai, avoir la vocation aide, mais je suis un peu embêtée quand j'entends ce mot, car il sert généralement d'échappatoire à tous ceux qui ne veulent pas traiter le personnel hospitalier correctement. Après tout, ce ne sont que des êtres humains, et c'est beaucoup plus facile de rester professionnel quand on est bien traité. Je n'excuse en aucun cas les écarts qu'on a pu observer, mais avouons tout de même qu'il est difficile de travailler dans ces conditions.

Parlons maintenant des enseignants. Une des premières mesures lorsque le danger a frappé à nos portes, a été de fermer les écoles. Du jour au lendemain, des milliers d'enseignants se sont ainsi retrouvés inoccupés, et face à des lendemains incertains. A ce jour, la reprise est prévue pour le 1er Juin, mais nul ne sait si toutes les classes sont concernées et comment ça va se passer, au vu de la pandémie qui évolue lentement, mais sûrement au Cameroun.
Même si théoriquement, le gros de la scolarité a déjà été versé par les parents dans les écoles privées, je mettrais ma main au feu que des promoteurs véreux n'hésitent pas actuellement à charcuter les salaires de leurs employés en prétextant le Covid-19. Certains camerounais se comportent comme des rats, sans la moindre vergogne.
Les salaires ne volaient déjà pas bien haut. J'ai été consternée quand j'ai appris à combien s'élevait la rémunération des instituteurs de mon fils, qui est pourtant dans une des écoles privées les plus connues de Douala. Sa scolarité à lui seul, couvre presque l'année salariale entière de chacune de ses maîtresses, et ils sont plus d'une vingtaine en classe. Un calcul rapide me fait comprendre qu'il s'agit d'une escroquerie sans nom et que la misère de ces hommes et femmes est exploitée par ces différents promoteurs. Alors imaginez un enseignant qui gagne 60.000 francs CFA, qui n'est pas déclaré à la CNPS (on se demande comment c'est possible, mais ca l'est), et qui se retrouve à la fin du mois avec la moitié de son salaire, sans avoir été prévenu, avec comme explication le covid-19, alors que 100% de la scolarité devait être payée par les parents depuis....janvier.
Je ne suis pas en train de conter un scénario potentiel, je suis en train de vous raconter ce qui est en train de se passer, dans une école que je ne citerai pas....encore. J'essaie actuellement de saisir le président de l'APE.

Cette crise m'a ouvert les yeux un peu plus sur le désespoir qui habite certaines personnes dans ce pays. Des gens que nous voyons marcher tous les jours, visiblement bien portants, mais qui pourtant sont sur un fil, perpétuellement, alors que leur apport pour la société est d'une importance capitale. Chacun peut essayer d'aider à son niveau : maintenir entièrement les salaires des employés par exemple, lorsqu'on le peut, alors même qu'ils sont renvoyés en confinement chez eux... mais cela ne remplacera jamais un système bien huilé et bien structuré.
Il est urgent de repenser les système médical et éducatif camerounais. Si nous voulons une population en bonne santé, et une population armée du savoir qu'il faut pour bâtir le Cameroun de demain, nous devons y mettre les moyens et mieux traiter notre ressource humaine. Nous avons investi (et détourné) des milliers de milliards pour une CAN devenue très hypothétique. Ah, le destin sait être méchant. Nous voilà avec nos stades sur les bras, et nous irons y installer des tentes pour accueillir les malades parce qu'il n y a pas assez d'hôpitaux. Nos enseignants, quant à eux vont souffrir, vivoter de gauche à droite, en proposant des cours de soutien, espérant pouvoir se nourrir de la sorte. Il est bien vrai qu'un ministre camerounais (le ministre des charades, les compreneurs comprendront), avait déclaré qu'on peut bien vivre au Cameroun avec le SMIC de 37.500, donc je suppose que je prêche dans le désert.

Ca m'a fait du bien d'écrire en tout cas.

mardi 13 mars 2018

Une histoire de migrants... Part III




Déjà plusieurs semaines que CNN a diffusé son reportage sur le traitement réservé aux migrants en Libye.... La tension est retombée comme un soufflé, à l'instar de toutes les polémiques précédentes ayant agité le landerneau afro sur les réseaux sociaux. Après avoir tempesté, y être allé de son petit commentaire, chacun (du moins la grande majorité) est retourné à sa vie, en attendant la nouvelle polémique... C'est cette propension à s'indigner sur les réseaux sociaux sans que rien ne soit fait pour s'attaquer aux causes profondes qui me chagrine un peu. Je ne me considère pas au dessus de la mêlée : en tant qu'individu, je suis tout autant coupable de passivité que la plupart d'entre vous, lecteurs et commentateurs. Au final, on pourrait passer pour les rigolos de service : toujours prompts à s'indigner, mais sans qu'il n'y ait de conséquences ou de vraies remises en cause des mécanismes qui nous sont propres, à nous Africains, et qui conduisent aux situations que nous décrions. A quoi bon parler si demain nous allons nous retrouver exactement dans la même situation? Les flux migratoires vers l'Europe ne cesseront pas de sitôt.

L'expérience vécue avec une jeune fille qui a travaillé pour moi quelques temps m'a prouvé qu'il est difficile de demander à qui que ce soit de renoncer à ses rêves d'ailleurs, quand le rêve sur place n'est pas possible. Marie*** (prénom modifié) s'est occupée de mon fils pendant six mois. Elle était la nounou idéale : honnête, bosseuse, bilingue, et jeune, donc avec assez de force pour suivre une boule d'énergie de deux ans. J'essayais au maximum de la mettre à l'aise, pour la fidéliser. En dehors de son salaire, je n'hésitais pas à être vraiment généreuse au niveau de son argent de taxi, et des micro-dépannages. Malgré tout, du jour au lendemain, après six mois, elle m'a annoncé qu'elle partait. "Ma tante m'a trouvé le réseau pour Mbeng, donc je vais partir dès demain"...
En réalité, je n'ai pas été surprise. Croire que les cinquante mille francs de salaire que je lui versais pouvaient constituer une bonne cagnotte pour se projeter dans la vie aurait été absurde.

Quand j'ai recruté Marie, elle revenait du Liban. Elle y avait passé deux années, et des échanges que j'ai pu avoir avec elle sur le sujet, ça n'avait pas été une expérience agréable. Elle travaillait comme nounou chez des employeurs qui ne la maltraitaient certes pas, mais qui n'hésitaient pas à la faire chanter pour son salaire. Elle était d'ailleurs revenue avec plusieurs mois non payés... Certaines de ses collègues avaient eu moins de chance. Il y en avait qui avaient été maltraitées, violées, ou jetées à la rue pour avoir osé revendiquer ce qui leur était dû. Vous avez du tous entendre au moins une fois une histoire sordide sur les employées de maison africaines au Liban. Elles ne sont pas inventées...
Malgré tout, à son retour, elle avait réussi à acheter un petit terrain de 200 mètres carrés à Bonendalle, sur lequel elle s'est malheureusement retrouvée empêtrée dans les camerouniaiseries classiques : le vendeur du terrain l'avait vendu à plusieurs personnes et finalement elle se retrouvait avec un terrain qui n'était plus vraiment le sien... Une histoire comme des milliers d'autres

Alors Marie s'était remise au travail, s'était installée en famille, avait réduit au maximum ses dépenses pour épargner, et finalement, avait cherché un réseau pour repartir. Quand elle m'a annoncé son départ, j'ai essayé de lui faire mesurer les risques encourus. Je lui ai parlé de tout : de la route qui n'était pas sûre, des conditions difficiles une fois sur place, de la prostitution forcée pour certaines, du froid, du racisme, de la possibilité pour elle de faire une formation sur place... Marie m'a regardé en souriant et m'a clouée le bec : "Madame, que je fasse une formation pour faire quoi? revenir être dame de ménage chez vous parce que mon diplôme ne m'aura pas aidée à trouver un travail?". Je ne pouvais pas la contredire. J'étais en plein casse tête, à essayer de trouver une solution pour mon jeune frère qui cherchait du travail depuis un an, après l'obtention de son diplôme.

Et c'est comme ça qu'elle est partie. Aujourd'hui, elle est en Autriche et nous nous parlons régulièrement sur Whatsapp. Elle me dit comment la vie est dure, comment elle devra sans doute payer pour avoir des papiers. Et quand je lui ai demandé si elle regrettait d'être partie du Cameroun, elle a été catégorique : "Absolument pas madame. En un an ici, j'ai déjà fait pour ma fille, plus que ce que j'aurais pu faire pour elle en dix ans au Cameroun en travaillant autant voire plus que les petits ménages au noir que je fais ici".

C'est pour ces mêmes raisons que certains des migrants rapatriés au Cameroun ont déjà repris le chemin de l'eldorado. Pour beaucoup, l'horreur vécue en Libye n'a absolument rien à envier à la misère qu'ils vivent au quotidien.
Beaucoup d'entre nous sommes des privilégiés qui ignorent à quel point ils le sont. C'est quand vous aurez visité des familles où le repas est servi une fois par jour, et où la viande est un luxe, que vous mettrez de l'eau dans votre vin.
...

Si nous souhaitons que nos compatriotes cessent de rêver d'ailleurs, nous devons travailler à faire naître les chances pour tous ici. Si nous voulons que les camerounais cessent de voir l'Europe comme un eldorado, nous devons créer notre propre eldorado sur place. Ces propos peuvent faire cliché, mais en réalité, c'est la seule et unique voie de sortie. Après, nous pouvons continuer à nous indigner. ça ne coute rien, et ça ne nous engage à rien, mais une chose est sûre, celà ne changera pas grand chose si on s'arrête à ça.




jeudi 8 mars 2018

Du droit de demander à son mari de faire la vaisselle



Nous sommes le 8 Mars, et c'est la journée internationale des droits de la femme. Je crois que l'occasion est bien choisie pour vous sortir mon petit discours de féministe.

J'ai fini par comprendre qu'être taxé de féministe, en 2018, dans notre société, est une insulte à peine déguisée. Oubliez les grands combats pour la dignité, la liberté et l'émancipation qui ont permis à la femme dans le monde d'arriver à obtenir certains droits qui nous semblent si naturels aujourd'hui... Le féminisme à la camerounaise en 2018 n'est pas très bien perçu.

La féministe pour mes compatriotes, c'est celle qui a passé trop de temps à l'étranger, ou qui a trop regardé la télévision, et qui pense qu'elle peut venir bousculer des règles établies par nos ancêtres depuis la nuit des temps. Vous savez, ces règles là dont on ne conserve que certains aspects, généralement ceux qui donnent un statut privilégié à l'homme, et dont on sait ignorer ceux qui nous rappellent à tous que tout est une question d'équilibre, avant d'être une question d'ego.


Je me souviens d'une discussion, un soir avec des amis. Alors qu'innocemment, je leur apprenais que chez moi, lorsque je reçois des gens, il n' y a rien de plus naturel que de trouver monsieur en train de faire la table ou de servir les apéritifs aux invités pendant que je suis à la cuisine ou en train de prendre une douche pour m'apprêter, j'ai été prise à parti tellement violemment que j'ai remis ma propre vie en question... J'ai appris avec incrédulité qu'il était tout juste hors de question que devant ses amis, un homme en soit réduit à aller chercher des olives pour les mettre dans un bol, parce que sa femme ne pouvait pas le faire. Alors que je demandais comment elle pourrait avoir le don d'ubiquité pour être à la fois en train de surveiller le poisson braisé et à parader devant les invités dans un kaba aux senteurs bien puantes, on m'a rétorqué qu'elle n'avait qu'à se débrouiller... Embaucher autant de domestiques que nécessaire... Se réveiller encore plus tôt que prévu... S'organiser mieux.... Peu importe la solution qu'elle trouvait, l'important était que monsieur ne soit pas mis à contribution devant les invités.
"tu l'émascules"
"donne lui sa place d'homme"
"tu as trop regardé la télévison"
"Mon père n'a jamais rien fait devant des invités. Ma mère se levait à 4h si nécessaire"
Donc comme ça, la masculinité d'un homme se mesure à la quasi déification dont il doit faire l'objet dans sa maison devant les invités, et faire preuve d'empathie, de compassion face à sa femme éventuellement débordée en l'aidant A METTRE DES PUTAINS D'OLIVES DANS UN BOL c'est un aveu de... faiblesse.  Je suis toujours perplexe.
J'ai aussi appris ce jour là qu'un homme marié ou en couple ne devait connaître la route de la cuisine que pour pouvoir se mettre devant cette porte et réitérer des instructions qu'il aurait hurlées depuis le salon mais que personne n'aurait entendues.
Si ça a l'air d'être une caricature pour vous, je vous assure que je n'exagère rien. 
C'est venu très vite après.
"tu es une féministe"
"tu as trop regardé la télévision"
Je n'étais pas en présence de parents. Non c'était des jeunes, dans la vingtaine ou la trentaine.
Ce qui m'a choquée ce n'était pas leur conception de la vie. Après tout, les arrangements des uns et des autres ne regardent qu'eux et si dans un couple, ils se sont entendus pour que monsieur ne fasse rien dans la maison, c'est leur manioc. Ce qui m'a choquée c'est le fait que ce qui se passe chez MOI fasse l'objet d'un jugement aussi dur de la part des autres. Comme si il fallait absolument se conformer au moule de notre société.
"on n'est pas en France ici, on est en Afrique, on a nos valeurs".

Justement, parlons en, de nos valeurs ancestrales, ces sacro-saintes règles qu'il ne faut surtout jamais remettre en question, parce que "nos aïeux ont toujours fonctionné comme ça".
Nos ancêtres avaient beaucoup de bon sens. Contrairement à ce qu'on peut croire aujourd'hui quand on voit comment certains veulent déformer ce qui était fait avant pour en tirer profit, les rôles étaient définis très intelligemment, et le respect était mutuel. La place de la femme dans la société ne se résumait pas uniquement à celle d'une bonniche qui doit tout faire sans rechigner tout en respectant son Dieu l'homme. Loin de là, très loin de là. L'homme et la femme étaient égaux, sans être semblables, et il en ressortait une répartition claire des tâches tenant compte des possibilités physiques et mentales des uns et des autres, pour arriver à un équilibre parfait. Tu vas à la chasse et à la pêche, je vais au champs et je gère la maison. Tu vas à la guerre, je gère les enfants. Chacun avait sa part du contrat à respecter.
J'ai la sensation qu'avec le temps qui passe, tout ceci a viré à une vaste arnaque. Alors que certains aspects ont forcément évolué (plus personne ne va à la chasse ou à la pêche -littéralement- pour nourrir sa famille, par exemple), vouloir ouvrir la discussion sur d'autres aspects revient à avoir perdu sa tête ou à être trop "occidentalisée". Progressivement, on a oublié que l'équilibre est important, et on en est réduit à essayer de préserver le statut du mâle.

Je prends un exemple. Si monsieur et madame travaillent, c'est naturel que madame participe aussi aux charges du foyer. Si elle ne le fait pas, il est commun qu'elle soit en fait en train d'investir une bonne partie de son revenu dans des tontines qui par la suite vont servir à financer les projets du couple. Mais si par malheur les horaires de travail de madame deviennent trop prenants, ce qui est naturel avec l'augmentation des responsabilités, il faudra qu'elle trouve le moyen de recruter une deuxième nounou car il est compliqué de demander à monsieur de renoncer à ses tournées dans les bars chaque soir après le boulot pour venir se consacrer aux enfants. Toujours le fameux "donne lui sa place d'homme". Pourquoi? Parce que c'est la femme qui élève les enfants. Pourquoi? Parce que ça a toujours été comme ça. Pourquoi?.... Pourquoi?.... Pourquoi?
Si on applique les 5 pourquoi, avec toute la bonne foi du monde, on arrive nécessairement à un blocage. Il  ne s'agissait pas seulement pour nos ancêtres de faire une dichotomie claire sur qui doit faire quoi, mais d'arriver à un bon équilibre en fonction des prédispositions et des possibilités des uns et des autres à ce moment là. Si la société évolue, pourquoi s'arc-bouter sur des positions établies il y a plusieurs siècles quand la situation était différente? L'équilibre d'hier n'est pas nécessairement celui d'aujourd'hui, car les paramètres ne sont plus les mêmes, n'en déplaise à certains

Pour la féministe que je suis, tout se résume donc à une question d'équilibre. Si la recherche de l'équilibre veut que je participe plus financièrement, pour que mon compagnon ne soit pas asphyxié par nos charges, je le ferai sans la moindre hésitation pour que nous soyons tous les deux à l'aise. Si la recherche de l'équilibre veut qu'il fasse la vaisselle pendant que je fais la cuisine pour qu'on mange vite tous les deux, alors il la fera et ça ne lui enlèvera pas sa paire de....

N'en déplaise aux nouveaux garants des traditions et aux "pick me".

Sinon bonne fête des droits de la femme. Entre deux soulèvements de kaba, pensez aussi que c'est aujourd'hui que vous devez vous rappeler que vous avez le droit, tous les autres jours de l'année, d'attendre plus des hommes.

jeudi 14 décembre 2017

Une histoire de migrants Part II

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Lorsque j'ai eu mon bac, je me suis directement envolée pour la France pour mes études. Je ne suis revenue en vacances au Cameroun pour la première fois que deux années plus tard.

Je n’ai pas particulièrement préparé ce retour. Je n’ai pas refait ma garde robe, je ne me suis pas équipée en maquillages, bijoux et autres.  Rien. J’avais les petites choses que j’avais pu accumuler en deux ans et c’était bien suffisant pour moi. De toutes les façons, j’étais étudiante, sans petit boulot en raison du planning chargé des classes préparatoires, et venant d’une famille modeste, je ne voulais surtout pas m’affubler d’une image qui ne correspondrait pas du tout à mes réalités. Au-delà de tout cela, au Cameroun, il y avait mon meilleur ami de l’époque, Oscar, qui était obsédé par Mbeng, et que je voulais absolument ramener sur terre.

Oscar vivait dans le même quartier que moi. . Il n’était pas dans la même école que moi mais trainait régulièrement devant le portail à la sortie des classes, délaissant ses propres études, qu’il a fini par abandonner en classe de troisième, alors qu’il n’était pas bête, juste perturbé, et obnubilé par la France et les US. Tout au long de mes années de collège, il avait fini par passer pour le clown de service auprès de la plupart de mes camarades de classe, surtout les filles, qu’il ne manquait jamais de draguer assez lourdement dès que l’opportunité lui était présentée, en parodiant les stars américaines des clips de l’époque.

Vous pouvez vous demander comment j’ai fait pour devenir amie avec quelqu’un comme ça, moi qui à l’époque était concentrée sur mes études… Oscar était foncièrement gentil. Au-delà de la stupidité caractéristique dont il pouvait faire preuve dès lors qu’il fallait parler de tout ce qui se trouve au-delà des océans, c’était quelqu’un de très humain et très bon, qui était devenu un grand frère de substitution pour moi. C’est la première personne que j’ai décidé de « sauver » dans ma vie. J’étais devenue la voix de la raison, à lui expliquer régulièrement que la France et les US n’étaient pas le paradis, et qu’il fallait qu’il essaie de se battre localement pour faire quelque chose de sa vie, qu’il fallait qu’il reprenne ses études, ou qu’il fasse une formation, pour avoir une base. Bien sûr, je prêchais dans le vent, et mon départ lui a juste permis de dire « tu vois… toi-même on te fait partir. Il n’y a rien de bon ici, je te dis ».

Quand je suis revenue en congés, j’ai donc tenu à rester la plus naturelle possible, afin de ne pas lui donner de fausses idées sur la France. Ca n’a pas du tout marché. Je n’étais pas la seule « panaméenne » à revenir en congés, mais vraisemblablement, j’étais la seule à ne pas être en mode « je vais vous en mettre plein la vue ».
Tous les weekends, des étudiants en France comme moi, dont je connaissais les difficultés, écumaient les boîtes de nuit avec une suite de courtisans, qu’ils arrosaient à coup d’euros qu’ils avaient minutieusement économisés les mois précédant leur retour… Chacun tenait à avoir des fringues de marque, de jolies chaussures, le téléphone dernier cri…. Le nombre de souscriptions à certains forfaits chez SFR a dû exploser à la veille des vacances d’été : le téléphone est pris, débloqué quelque part vers Barbès avant le retour, et on se pavane dans Douala avec pendant un mois, en sachant pertinemment qu’on va avoir des problèmes avec la banque et SFR dès le retour quand on ne pourra plus payer les traites obligatoires pendant un an. Mais ce n’était pas grave…  il fallait absolument tenir le rang de « panaméen ».
Je me souviens encore de cet ancien camarade qui m’a froidement dit à une fête à laquelle je participais une semaine après mon arrivée : « tu ne ressembles pas à quelqu’un qui vient de Mbeng ». Tenez vous bien, je n’étais pas vêtue de haillons hein… juste pas assez sophistiquée à son goût. En plus, je prenais le taxi… Je ne vous cache pas que j’avais été blessée dans mon orgueil et qu’à ce jour, je continue à le traiter intérieurement de « chouagne » quand je le croise…

Tout le laïus que j’ai préparé pour Oscar n’a servi à rien. J’ai eu beau lui dire que c’était dur,  lui parler du froid et du calvaire des sans abris, lui dire que certaines personnes qui se la racontaient quand ils étaient en vacances au pays faisaient des escroqueries à la carte bleue et flirtaient avec la prison, que d’autres avaient des emplois tellement dégradants que lui ne pourrait jamais accepter de le faire, que certains allaient jusqu’à emprunter des vêtements en prévision de leurs vacances aux pays, qu’il fallait commencer par apprendre à se battre au Cameroun…. Il est simplement arrivé à une conclusion : je lui mentais pour le décourager. Et je voyais comment l’attitude de certains autres en congés le plongeait un peu plus dans un état de psychose avancé… Il fallait absolument qu’il parte du Cameroun lui aussi !

Quand on avance dans la vie, on finit par se séparer des personnes qui ne vont pas dans le même sens. Inéluctablement, les années qui ont suivi, j’ai cessé d’être amie avec lui. Pendant que j’avais des préoccupations pragmatiques, sur mes études, ma carrière, préparer mon retour, Oscar restait enfoncé dans son obsession:  il m’envoyait régulièrement des messages lui demandant de lui trouver une de mes camarades de classe blanche, « du genre bien laide, bien bête, mais bien riche », qui pourrait le faire monter à Paname. Entre temps, il ne faisait absolument rien de sa vie, et vivotait en quémandant à gauche et à droite. J’ai fini par perdre sa trace, sa mère ayant elle-même fini par le mettre à la porte.

Nous voici rendus quelques années plus tard. Mon petit frère alors étudiant au Maroc m’envoie un message un jour. « Oscar est chez moi ».  « Oscar ? Quel Oscar ??? »
C’était bien notre ancien voisin du quartier, qui était en « transit  au Maroc, en route pour Mbeng. Oscar s’est rendu au Mali à partir du Cameroun (les Camerounais n’auraient pas de difficultés à s’y rendre), a ensuite fait de faux papiers maliens, et est arrivé au Maroc. Son objectif était d’arriver en Europe, et en attendant de trouver le moyen de passer le canal de Suez, il cherchait un toit, et s’était rendu chez mon jeune frère. Je suis tombée des nues, face à toute cette détermination. Oscar avait été incapable de faire le moindre travail au Cameroun, jugeant tout indigne de sa personne, mais il était prêt à tout pour arriver en Europe, y compris à s’appeler Ali Keita. J’ai repris contact avec lui et je lui ai demandé de trouver rapidement une solution et de quitter la chambre de mon petit frère. A ce moment là, la seule chose qui m’importait était de préserver la tranquillité de ce dernier qui était au Maroc pour étudier, et pas pour autre chose. Il m’en a voulu à mort, et je n’ai plus eu de ses nouvelles pendant de longues années.
Aujourd’hui, Oscar serait quelque part à Nice. Oui, il a fini par arriver où il voulait arriver. Je ne sais pas comment il a fait. Je ne sais pas s’il a pris un bateau ou s’il a pris les papiers de quelqu’un. La dernière fois que j’ai eu de ses nouvelles, c’est par une ancienne connaissance commune qui travaille désormais au Congo, qui m’a expliqué qu’Oscar depuis Nice continue à lui demander de le faroter. Comme quoi, sa vie n’a pas vraiment changé. J’aimerais bien le revoir aujourd’hui, pour comprendre s’il a enfin réalisé qu’il a poursuivi une chimère toute sa vie.Il aurait mis la même détermination à finir ses études qu'il aurait même pu aller jusqu'au doctorat. Mais, il ne rêvait que de la France et des US, parce qu'il a vu les autres avec de belles fringues et de grands parfums.

Que peut-on faire pour ce genre de personne qui existeront toujours? Honnêtement je ne sais pas. On aura beau leur parler, rien ne changera dans leur tête. C'est déjà quasiment pathologique. Mais j’en appelle quand même à la responsabilité de tous ceux qui vivent hors du Cameroun. Il est tout à fait humain de vouloir montrer qu’on a réussi, ou simplement de vouloir sauver la face, mais il n’est pas indiqué de vendre des illusions à ceux qui sont restés. Il n’est peut être pas facile d’avouer qu’on a du épouser une femme qui a le double de son âge pour arriver à avoir une situation stable, il n’est pas évident de dire à tous ceux là qui nous admirent et nous encensent que l’argent que nous sommes en train de flamber correspond à plusieurs mois d’économie… Mais il faut apprendre à le faire. Parce qu’il y a des faibles d’esprit. Parce qu’il y a des personnes qui ont besoin de redescendre sur terre. Parce qu’il suffit simplement de la prise de conscience que dans tous les cas, il faut se battre, pour parfois inciter ceux qui sont sur place à se retrousser les manches au lieu de concentrer leur énergie à entamer un périple qui leur coûtera peut-être la vie.  En réalité, ce qui compte ce n’est pas où on veut géographiquement arriver, mais où on veut arriver dans la vie,  et nous devons éviter d’induire nos compatriotes en erreur en les amenant à croire que les deux se confondent, en leur montrant exclusivement une vie de paillettes.

lundi 11 décembre 2017

Une histoire de migrants part I



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Lorsque je le vois pour la première fois, il est dans le bureau d'une de mes collègues, avec un sac plein de vêtements, qu'il essaie de lui vendre. Je m'arrête, et je regarde aussi ce qui est proposé. Je trouve quelques articles intéressants et je prends son contact, en lui proposant de revenir la semaine d'après avec d'autres articles de ce genre. Pour une paresseuse comme moi qui n'est adepte que du shopping sans effort -c'est à dire en ligne- ce jeune homme est une aubaine.

Il s'appelle Alain et il a une trentaine d'années. C'est un vendeur de vêtements, qui a une boutique à Ndokoti, et un portefeuille de clientes privilégiées vers qui il se déplace lorsqu'il a des articles qui pourraient les intéresser.

Il est revenu la semaine d'après, et je lui ai acheté deux robes que j'ai trouvées particulièrement jolies. J'ai maladroitement essayé de négocier au niveau du prix et puis ma nature expéditive m'a rattrapée. J'ai fini par les prendre pas très loin du prix taxé, mais à un prix toujours plus intéressant que celui des boutiques huppées d'Akwa qui s'approvisionnent aussi... chez lui. C'est ainsi que s'est tissée une relation d'affaires. Il savait à peu près le type de vêtements qui me plaisait, et m'envoyait régulièrement des whatsapp chaque fois qu'il y avait un arrivage susceptible de m'intéresser. Lorsque mon attention était piquée, je l'invitais à passer au bureau et je prenais ce qui m'intéressait, en le dédommageant pour son déplacement.

Ca a duré environ six mois, et puis du jour au lendemain, Alino, comme on l'appelait, a cessé de m'envoyer des messages. N'étant pas une acheteuse compulsive, je ne l'ai cherché qu'une fois, après quelques mois, mais sa réponse a été molle et il n'est pas venu au bureau comme d'habitude. Six autres mois sont passés. Ma collègue, qui habitait dans le même quartier de lui, m'a signalé qu'elle ne savait pas où il était passé, mais qu'elle continuait à voir ses enfants de temps en temps dans le quartier.

Nous voici rendus en Décembre 2017, plus d'un an après la dernière fois que j'ai vu Alino.

Aujourd'hui, j'ai été informée qu'il est mort en Libye. Les derniers reportages de CNN et le retour des migrants organisés par les autorités camerounaises ont permis à sa famille de prendre des renseignements auprès de ceux qui l'ont croisé là bas.

Alino est mort noyé dans l'eau, lorsque l'embarcation qui le transportait a chaviré. Je n'étais pas particulièrement proche de lui, mais j'ai pensé au type de personne qu'il était, très battant et débrouillard, prêt à tout pour gagner sa pitance et s'occuper de ses enfants. Et je me suis rappelé qu'il y avait certains "bien-pensants" dont la réaction avait été de fustiger les "paresseux" qui refusaient de se battre au Cameroun et préféraient sacrifier leur vie sur des chemins tortueux dans l'espoir d'atteindre l'eldorado européen, au lieu de "travailler".

Alino était marié. Quelques mois avant son départ, son épouse a pris la route et est arrivée en Italie, en passant par cette même Libye. Elle a commencé à se débrouiller et à envoyer de temps en temps un peu d'argent pour aider son mari qui est resté avec les enfants. Ces euros ont été une véritable aubaine mais ils étaient loin d'être suffisants, dans une famille où tout le monde était dans la pauvreté, et où la moindre maladie était synonyme de mort. Alino se débrouillait, de toutes ses forces, mais c'était loin d'assurer la présence d'un repas dans le plat de ses enfants chaque jour, avec les agents des impôts qui ne manquaient pas de le racketter à l'occasion. Alors, ils ont décidé ensemble, qu'il était préférable qu'Alino laisse les enfants à la grand mère, et qu'il la rejoigne, pour qu'ensemble ils continuent à se battre pour sortir définitivement leur famille de la misère.

A-t-il évalué les risques avant de se mettre en route? Certainement. L'a-t-il fait parce qu'il refusait de se battre au Cameroun, où était trop paresseux pour retrousser les manches? Non. Alino était debout tous les jours à cinq heures, pour être le premier au déballage, travaillait parfois jusqu'à la tombée de la nuit, pour s'occuper de sa famille.  Mais c'était clairement insuffisant pour mettre sa famille à l'abri du besoin, et surtout, il ne voyait pas le bout du tunnel. Alors il a préféré mettre sa vie en jeu, pour rejoindre un environnement où l'espoir semblait permis pour lui. Et il y a laissé sa vie.

Je pense à tous ces bienheureux qui ont eu la chance de naitre avec plus de chances que d'autres, et qui se sont permis à la suite des reportages de CNN de porter des jugements hâtifs sur les motivations de ces différents migrants. Le fait que certains aient vu la mort, et soient prêts à repartir une fois la cagnotte reconstituée devrait plutôt nous interpeller : qu'est devenu le Cameroun pour que nos frères camerounais soient prêts à affronter l'enfer pour en sortir? Sont-ils tous vraiment les rêveurs, naifs, paresseux que certains ont décrits? 

Paix à l'âme d'Alino et de tous ces autres à qui on a enlevé l'espoir.

jeudi 8 juin 2017

Part II... La route ne tue pas...



Quand je venais juste de démarrer ce blog, j'ai rédigé un article sur la route au Cameroun... Je savais que je ne pouvais pas traiter le sujet de façon exhaustive et j'avais à l'époque intitulé le billet "Part I... la route ne tue pas", avec pour ambition de revenir continuer à déblatérer sur le sujet. Bien des mois (des années) après, je me rends compte que je n'ai jamais pris la peine de continuer cette série sur les problèmes routiers que nous connaissons dans ce pays. En réalité, je crois que j'ai tellement été dépassée par le niveau de désordre que je n'ai plus trouvé les mots pour pouvoir qualifier ce triste spectacle auquel j'assistais.

Pourquoi je me décide à recommencer ce soir? J'ai assisté il y a quelques jours à une scène qui m'a secouée. Certains diront que je l'ai été plus que nécessaire : après tout, après trois ans et demi passés au Cameroun, certaines scènes d'horreur devraient faire partie de mon quotidien... Il suffit d'allumer sa radio le matin pour entendre parler de ces motos écrabouillées par des camions, des agressions à main armées, des viols sur mineurs, des accidents de la route sur nos grands axes, de personnes fauchées par des motos... Mais non, je crois que je ne serai jamais anesthésiée face à l'horreur.

J'ai vu un piéton se faire faucher par une voiture. En plein embouteillage. Oui, un putain d'embouteillage où toutes les voitures sont rangées à la queue leu leu et doivent attendre quinze minutes pour parcourir un mètre. Comment cela a-t-il pu se produire, alors que le monsieur était sur le trottoir? Simplement parce qu'au lieu de faire comme tout le monde et patienter le temps que la police présente sur les lieux fluidifie la circulation, certains camerounais ont décrété qu'ils étaient plus pressés que le reste du monde, que leur temps à eux était plus précieux, et ont commencé à rouler sur le trottoir. Et une personne parmi ce tas d'idiots est allée percuter une glissière et a perdu le contrôle de sa voiture, fauchant au passage une personne qui marchait tranquillement à l'autre bout du trottoir... Ce qui est encore plus triste dans toute cette situation, au delà de la vie de cet homme qui est peut être perdue aujourd'hui, c'est le fait que la responsable de l'accident pourra potentiellement passer en travers les mailles du filet. On est au Cameroun et la bonne dame conduisait un Nissan 4x4 neuf. Autant dire, qu'elle vient potentiellement d'une classe sociale qui n'a pas souvent trop de mal à passer à travers les mailles du filet. J'espère sincèrement que la famille de la personne fauchée ne lâchera pas l'affaire.

Ce comportement irresponsable est la NORME dans la circulation routière au Cameroun. Personne ne respecte rien et l'incivisme est à son paroxysme. Et gardez vous bien de vouloir bien faire et de vouloir sensibiliser vos compatriotes à mieux faire.

Je me fais insulter régulièrement parce que je respecte systématiquement un feu rouge. Un monsieur plus que respectable est allé un jour jusqu'à descendre de son véhicule pour venir m'apostropher parce que je refusais d'avancer tant que le feu n'était pas repassé au vert. Le comble c'est qu'un poste de police est situé à ce carrefour là, mais la potentielle présence de la police n'a pas l'air de dissuader les usagers qui s'inventent une flèche orange imaginaire qui justifierait le droit de traverser pour aller à droite.

Toutes les catégories d'usagers sont concernées par les bêtises. Les automobilistes, taxis, motos et camionneurs s'insultent entre eux mais il n'y a personne pour rattraper l'autre.
Commençons par mes ennemis préférés.
Je travaille en zone industrielle, et je suis obligée de passer par Ndokoti tous les matins. J'ai développé une inimitié particulière pour les motos et les camions.

Les conducteurs des motos sont juste idiots, pour la plupart. Partez de ce principe simple, et vous sauverez la vie de plusieurs d'entre eux derrière votre volant. Ils s'emmitouflent dans des doudounes, des blousons, écharpes, gants et bonnets, sous un soleil ardent avec une température à l'ombre de 35°, et cet équipement les persuade qu'ils sont immortels. Ils entrent dans des bras de fer incompréhensibles avec des voitures, parfois mêmes des camions, se comportant comme si ils ne sont pas les plus exposés. Les feux rouges ne les concernent jamais, sauf éventuellement les jours où les policiers en charge de la circulation durcissent le ton et se munissent de bâtons pour fouetter les plus intrépides d'entre eux. Le sens de la circulation aussi ne semble pas les concerner. Ils roulent dans tous les sens, sans aucune gêne, allant même jusqu'à vous insulter si vous les gênez. Les dépassements sont incontrôlables, à gauche comme à droite et ils n'hésitent pas à s'arrêter en plein milieu de la chaussée pour déposer ou prendre leurs clients..
90% des embouteillages à Ndokoti sont dûs aux motos (et aux piétons, mais on en reparlera).
Quand j'observe leur comportement, derrière mon volant, et que je pense au nombre incalculable de fois où j'ai dû faire face à un d'eux, prenant sur moi de penser à leur sécurité à leur place, je suis confortée dans ma position qui est de ne JAMAIS prendre la moto, quelles que soient les circonstances. J'ai eu recours aux deux roues deux fois dans ma vie : une fois en 2003, et une fois il y a deux semaines, juste pour voir quel effet ça faisait. Cette statistique ne risque pas de changer de sitôt. On pourrait croire qu'ils troquent systématiquement leurs cerveaux en échange de leurs deux-roues.
J'en viens à apprécier particulièrement les jours de forte pluie. Certes, il est difficile de circuler même en voiture, avec les mini-lacs qui se forment encore ça et là, et la faible visibilité, mais la pluie a ceci de merveilleux qu'elle oblige les motos à déserter les routes. Il n'y a rien de plus reposant que d'arriver au travail le matin sans avoir eu à s'inquiéter de sa carrosserie ou de se retrouver avec un corps sur les bras.

Parlons maintenant des camionneurs. Déjà, il faut comprendre que le Cameroun est le cimetière de tous les camions destinés à la casse en Europe.  Ce qui signifie que très peu de camions en arrivant ici répondent encore réellement aux normes élémentaires en matière de sécurité. Il y a certains camions qui sont de façon visible tellement vieux que je me dis que le chauffeur risque le tétanos à chaque fois qu'il se glisse dans la cabine. Si on rajoute à cela le nombre de visites techniques qui sont obtenues en glissant un billet au contrôleur, sans que le contrôle ne soit réellement fait, vous comprenez qu'il faut absolument se méfier des camions. Ayez peur si il y en a un sur une descente derrière vous, ou sur une montée devant vous. Fuyez! Le cas des freins qui lâche est tellement courant qu'entendre parler des accidents liés à cette défaillance fait quasiment partie du quotidien.
On peut aussi parler de ces containers et cargaisons amarrés à la va-vite qui se renversent et écrasent d'autres usagers. Je m'interroge régulièrement sur la règlementation à ce sujet et sur les mesures de sécurité qui sont prises dans les entreprises pour sécuriser leurs chargements. Je connais au moins trois cas tragiques qui se sont produits depuis que je suis rentrée et d'autres moins tragique : lorsque la bière se renverse en route par exemple. Généralement les populations sont contentes de l'aubaine et se précipitent pour sauver les bouteilles qui peuvent encore l'être mais parfois je me demande si ils sont conscients que ces casiers auraient pu s'effondre sur quelqu'un et le tuer...
Aucune mesure ne semble être prise par nos pouvoirs publics pour arriver à maîtriser tous ces accidents dans lesquels des gros transporteurs sont impliqués. A chaque accident, il y a la consernation générale, et puis plus rien. "On va faire comment?!". Voila la formule consacrée des camerounais.
Au delà de l'état lamentable des véhicules, on peut aussi parler de la méchanceté des camionneurs. Je ne trouve pas d'autre mots pour qualifier leur attitude sur les routes. Vu que je travaille en zone industrielle, j'ai le loisir d'admirer leurs prouesses tout le temps. Un gros porteur, avec une charge, qui roule à 70km/h alors que la limite est fixée à 50km/h? Rien de surprenant. Ceux qui le verront venir s'écarteront ou mourront. Après tout, ne sont-ils pas invincibles et immortels du haut de leurs cabines? Ils n'hésitent pas à forcer et à faufiler, un comportement que je trouve particulièrement irresponsable, car les conséquences d'un accrochage avec un camion sont potentiellement les plus graves. Autant, avec les motos il faut apprendre à les éviter de peur de les tuer sans que l'idée de leur propre mort ne les effraie, autant il faut éviter les camions car l'idée de vous tuer ne les perturbe pas plus que ça non plus.

Une nouvelle calamité a fait son apparition depuis quelques années : les tricycles. Ils sont pourtant bien pratiques pour les petites livraisons et les déménagements dans la ville mais il se pose plusieurs problèmes. Premièrement, la plupart ne sont pas munis de rétroviseur. Ils ne roulent pas très vite sur les routes, et quand l'envie vous prend de les dépasser, vous n'êtes pas à l'abri d'un braquage soudain à droite ou à gauche, le tout bien sans qu'aucun clignotant n'ait signalé auparavant son intention de bifurquer. . Deuxièmement, ils n'ont pas l'air de maitriser leurs gabarits. Ils essaient aussi de se faufiler, généralement dans des espaces où leur chargement lui, passe difficilement. Ils sont actuellement la plus grande cause de rayures et de chocs mineurs sur les carrosseries. Bien sûr, ça reste bénin, mais les carrossiers n'ont jamais travaillé gratuitement.
Maintenant, parlons les taxis. Eux, ils pensent pouvoir s'arrêter et repartir à leur guise, sans utiliser de clignotant ou sans regarder leur rétro, pour prendre et décharger leurs clients. Une proportion non négligeable d'entre eux n'est pas propriétaire des véhicules qu'ils utilisent, et par conséquent, ils s'en foutent des dégâts éventuels sur leur voiture. Tout ce qui leur importe c'est de gagner du temps. Celui qui va forcer le passage avec un taxi a de fortes chances de perdre son bras de fer. Il va finir avec des rayures qu'il devra payer pour enlever, pendant que le taxi s'en foutra des dégâts sur sa voiture. Le soir après le service, il expliquera au patron qu'un monsieur l'a gratté et s'est enfui.

Pour finir, je vais parler des piétons, mais pas n'importe lesquels, ceux de Ndokoti. Il m'est arrivé de ne pas avoir de voiture et de devoir marcher dans cette zone. Je me suis toujours à traverser prudemment et à rester sur le trottoir. Mais cette attitude n'est pas le cas de tout le monde. Certains piétons contribuent hautement à l'anarchie qui règne en ce lieu. On traverse n'importe où, n'importe comment, on supplie les voitures de s'arrêter parce qu'on veut passer, on marche directement sur la chaussée... Pourtant, il y a des feux qui fonctionnent. Mais comme les motos, les piétons considèrent qu'ils ne sont pas concernés. Le résultat premier sont ces embouteillages permanents qui règnent à Ndokoti. Je suis d'avis que le fameux échangeur que tout le monde réclame à cet endroit n'est pas encore nécessaire. Si les Camerounais arrivaient à faire preuve d'un minimum de discipline, on respirerait un peu mieux dans cette zone.

Je peux m'étendre encore et encore, et poursuivre mon coup de gueule advitam eternaem. J'en ai particulièrement marre du stress permanent dans lequel je me retrouve chaque fois que je dois prendre le volant. J'en viens presque à envier les baos de Yaoundé et leurs grosses cylindrées qui se font vider la route systématiquement lorsqu'ils veulent passer. Si je pouvais aussi avoir cette chance, j'aurais certainement la migraine moins souvent.

Je souhaiterais sensibiliser chacun de mes compatriotes. Comme dans la plupart des secteurs; on a beau désigner le premier coupable Paul Biya, mais en réalité chacun de nous apporte sa pierre à l'édifice du désordre ambiant. Avez vous des fusils pointés sur vos tempes lorsque vous allez boire "quelques" bières et que vous vous retrouvez à prendre le volant pour finir encastrés dans des mûrs? Entendez vous une voix depuis Etoudi vous susurrer d'essayer de forcer et de vous faufiler pendant les embouteillages parce que vous ne pouvez pas patienter? Qui vous oblige à vous comporter de façon indisciplinée et incivique? Quand vous êtes repris, n'êtes vous pas les premiers à dire "aah, celui là se prend pour qui?"

Finalement, on n'a que le pays qu'on mérite.

lundi 27 mars 2017

J'ai donc été à Bota Beach House....



Bonjour à tous

Je ne sais pas si je l'ai souvent dit ici, mais un de mes passe-temps favoris est le voyage. N'étant pas assez riche pour m'offrir des séjours à travers la planète, j'essaie autant que possible de me rattraper au niveau local, surtout que nous avons quelques pépites au Cameroun qui valent vraiment le détour...
Dès que je m'ennuie ou que l'opportunité se présente,  et que j'ai quelques CFA qui traînent (évidemment ce n'est pas gratuit), je m'évade : Ouest, Sud-Ouest, Nord, Sud.... J'avais établi en 2013 une checklist de lieux à visiter que je n'ai même pas encore terminée, en grande partie à cause de Boko Haram, et de ma voiture pas adaptée à certaines routes....

Ce weekend, j'ai enfin eu l'opportunité de me rendre dans un lieu dont on ne m'avait dit que du bien jusqu'à présent : Bota Beach House, à Limbe. A chaque fois que j'ai essayé de m'y rendre par le passé, il y a eu un couac : voyage annulé à la dernière minute, pas de chambres disponibles... Les photos, les retours d'amis plus que conquis avaient fini par transformer en obsession mon envie de se rendre à cet endroit...

Ce weekend, j'ai donc enfin pu réaliser ce fantasme. Et comme pour tout fantasme qui se réalise, il y a la déception inéluctable.
Vendredi, nous avons appelé pour réserver une de leurs chambres "normales" (à 50.000 francs la nuitée quand même), et avons appris avec un peu de dépit qu'elles étaient prises, et qu'il ne restait qu'une suite à 95.000 francs CFA. Comme j'étais vraiment en mode "ballin" et que j'avais absolument besoin de m'évader, j'ai insisté pour qu'on la prenne quand même.

Entre nous, à 95.000 francs la nuit, j'ai le droit de m'attendre à quelque chose de fabuleux non? En terme de cadre, d'infrastructures mais aussi d'aménagement... Pour la petite histoire, lors de mon dernier déplacement à Kribi, nous avons opté pour un Airbnb à 100.000 francs la nuitée,  avec 5 chambres, des douches ultra-modernes, des meubles dans un état impeccable et des lits douillets dans toutes les chambres.... Il ne manquait vraiment que la piscine. Je me suis donc dit qu'avec 95.000 francs, nous devrions être dans un cadre parfait.



Nous voici donc à Limbe. On note l'accès un peu difficile à la maison d'hôtes, mais je ne leur en tiens pas vraiment rigueur. Être situé en bord de mer généralement demande des sacrifices en termes d'accès. Je suis charmée à l'arrivée : jolie petite entrée, très boisée, gazon impeccablement tondu,   piscine avec en arrière plan la vue sur la mer, et surtout l'espace pour que les enfants courent et jouent.




A notre arrivée, il y a quelques clients qui sont dans la piscine et je remarque qu'elle est assez petite et ne peut pas vraiment être partagée... Qu'à cela ne tienne, j'aime le cadre. Nous devons d'abord prendre nos quartiers. Nous sommes accueillis par le gérant des lieux, qui nous guide vers notre suite.






Là, première GROSSE déception. Elle est minuscule. Vraiment minuscule. Je ne donne pas plus de 12m² pour le petit salon, pareil pour la chambre. Au salon, une grande télé et un canapé d'angle un peu vieillot. D'accord, elle donne vraiment sur la mer avec une grande baie vitrée mais la vue seule ne peut absolument pas justifier le tarif appliqué. Pire, le lit : un mètre sur un mètre quatre vingt. Alors imaginez deux adultes, un à 1m76 et l'autre à 1m90 qui doivent se serrer dessus. La moindre des choses aurait été un King Size Bed, mais on comprend vite que ça aurait été impossible vu la taille de la chambre. D'ailleurs dans la chambre, la télévision est minuscule. Une autre découverte très désagréable : Aucune des deux clims ne marche. Celle du salon crache de l'air en mode ventilateur, pendant que celle de la chambre s'arrête d'elle même toutes les deux minutes. Problème de tension on nous dit. Le problème sera résolu. Quand? Bientôt.


Jusque là, aucun de nous ne se plaint, malgré la chaleur cuisante et nous ouvrons juste grand les fenêtres pour laisser le vent entrer. Il faut dire que la semaine a été difficile et qu'on est même prêts à pardonner, pourvu qu'on ait un séjour agréable. La maison ne propose pas de cuisine, il faut donc commander à l'extérieur. C'est un point qui a été souligné à l'avance donc pas de mauvaise surprise et après avoir réussi à joindre le numéro du restaurant communiqué, nous décidons de profiter de la piscine désormais vide avec un couple d'amis qui nous a rejoints et qui crève de chaleur dans la suite, en espérant que les problèmes qui peuvent être résolus le seront durant le temps de détente. En précisant que nous nous rabattons sur la piscine parce que nous réalisons que nous avions tort en pensant qu'on disposerait d'une plage privée. Sur la piscine, rien à dire. En réalité, le cadre est l'atout principal de Bota Beach House. Si ce n'est le seul.

Après la piscine, je décide de prendre une douche. Je me rends compte que l'eau coule à peine et je le signale à une des employées de la maison. Elle me dit qu'elle va remettre la pression. Ok. Je décide donc de manger d'abord. C'est là que nous constatons qu'il n'y a aucun couvert à disposition, et qu'il faut tout demander, y compris les verres. Pas de soucis, nous demandons et on nous les apporte. Ils sont immédiatement TOUS emportés après utilisation, nous laissant perplexes : serons nous obligés systématiquement de boire à la trompette lorsque nous le voudrons? Ou faudra-t-il toujours fouiller toute la propriété pour trouver un employé qui pourra donner un verre?

Après avoir mangé et digéré, je veux enfin reprendre cette fameuse douche. Et l'eau ne coule toujours pas correctement. Je me débrouille donc comme je peux.
 J'aperçois le jaccuzzi dont je comptais bien profiter dans la soirée (à ce tarif!!!) et je demande à l'employé que je croise si il est utilisable, et il me répond non. Problèmes de tensions. Ok.

Entre temps, la clim ne marche toujours pas.

On parle toujours de 95.000 francs CFA la nuitée. Et aucun de nous ne s'est encore plaint.

Nous décidons autour de 17h d'aller profiter de Limbe. De retour autour de minuit, nous sommes accueillis par le responsable que nous avons vu à notre arrivé. Alors que je m'attends à ce qu'il nous présente des excuses pour les problèmes de la journée, il nous apostrophe plutôt sur le fait que nous avons utilisé la piscine avec des personnes extérieures à la maison, en insistant dessus. "We don't function like that". Très bien. Il nous raconte comment son patron était présent dans la journée et il a du nous faire passer pour ses invités pour que ces derniers ne demandent pas que nous payons un supplément.  Je lui demande si la clim et l'eau marchent, comme pour lui rappeler qu'en réalité, nous sommes très loin d'être satisfaits de ce qui nous est proposé, et là il nous répond sans aucune gêne : "bien sûr, vous aurez tellement froid que vous risquez de fuir la chambre". Pour le coup, j'ai vraiment décidé de rester tranquille. Je mourrais d'envie de lui dire que si j'avais su que les personnes que nous avions aperçues le matin étaient les propriétaires de la maison, je serais allée vers eux pour leur dire que le service était très en dessous des attentes pour les tarifs qu'ils pratiquaient. Et surtout, si ils avaient commis l'erreur hasardeuse de venir nous demander un supplément parce que deux invités étaient avec nous dans une piscine vide à cet instant, nous serions partis de leur maison sans le moindre état d'âme. A 95.000 francs la nuitée, je réitère, il y a un minimum qui est attendu et nous étions trop loin pour que ça soit sa première préoccupation.

On ne dit donc rien et on va se coucher, avec déjà la ferme conviction que c'était notre premier et dernier séjour à Bota Beach House. Effectivement, la clim de la chambre marche à notre arrivée mais pendant deux heures seulement. Après deux heures, le cirque de l'arrêt intempestif reprend. Donc autour de 5h du matin, la chaleur s'est à nouveau bien installée. Et pendant tout le temps, la clim du salon continue en mode ventilateur, un mode qu'elle n'a jamais quitté.

Le lendemain matin, le réveil n'est pas simple. Il faut dire que le lit, en plus d'être petit, n'a rien de confortable. Après la douche, nous n'avons même pas souhaité nous éterniser là et nous sommes préparés à partir directement. Surtout qu'il n'y avait évidemment pas moyen de prendre le petit déjeuner sur place. Sauf que pendant trente minutes, il a fallu chercher quelqu'un dans toute la maison pour payer, tous les employés étant vraisemblablement absents. C'est ainsi que nous nous sommes rendus compte en visitant l'intérieur que la maison est en fait la résidence secondaire d'une famille qui la rentabilise, avec les dépendances (les fameuses suites) en mettant en location. Et que les chambres à 50.000 francs CFA s'apparentaient à des chambres d'adolescent, avec une des chambres qui n'est même pas équipée d'une douche et dans laquelle les occupants sont obligés de sortir dans le couloir pour accéder à la salle de bains et aux toilettes.

Donc en gros, un airbnb à Limbe avec les tarifs du Hilton à Yaoundé. Merci bien.

J'avoue que j'ai été très désagréablement surprise. Comme je l'expliquais plus haut, je n'avais eu QUE des retours positifs sur cette maison d'hôtes, tellement positifs que j'ai fait fi des prix très (trop) élevés en me disant qu'il devait bien y avoir quelque chose de particulier. Mais j'ai constaté avec consternation qu'en dehors du cadre, le reste du service ne suivait pas du tout. Je ne sais pas si nous avons joué de malchance, ou si la notoriété de la maison commence à monter à la tête du gérant qui en oublie les services les plus élémentaires.

Dans tous les cas, avec l'essor des Airbnb au Cameroun, Bota Beach House va être obligée à terme de revoir sa politique, au niveau des tarifs ou niveau des services proposés. De plus en plus de personnes investissent dans des résidences secondaires et proposent des locations saisonnières. Si aujourd'hui, le choix en bord de mer reste limité à Limbe, je ne doute pas un seul instant que d'ici quelques années, il y en aura plus. Et personne n'acceptera de payer 95.000 francs pour ce que nous avons eu.
A Kribi, à titre d'exemple, une maison de cet acabit peut être trouvée autour de 150.000 à 200.000 francs la nuitée, et je parle de la maison entière, avec piscine et accès à une plage privée. Peut être que c'est fait exprès pour filtrer les visiteurs, mais dans tous les cas pour l'instant, le rapport qualité-prix est très mauvais. Pour la taille de la suite mise à notre disposition, un tarif de 60.000 francs maximum aurait été acceptable, et bien sûr sans les problèmes de climatisation et d'eau.

Je finis quand même sur une note positive, qui est le cadre à couper le souffle.... J'espère vraiment que le service va s'améliorer.