lundi 11 décembre 2017

Une histoire de migrants part I



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Lorsque je le vois pour la première fois, il est dans le bureau d'une de mes collègues, avec un sac plein de vêtements, qu'il essaie de lui vendre. Je m'arrête, et je regarde aussi ce qui est proposé. Je trouve quelques articles intéressants et je prends son contact, en lui proposant de revenir la semaine d'après avec d'autres articles de ce genre. Pour une paresseuse comme moi qui n'est adepte que du shopping sans effort -c'est à dire en ligne- ce jeune homme est une aubaine.

Il s'appelle Alain et il a une trentaine d'années. C'est un vendeur de vêtements, qui a une boutique à Ndokoti, et un portefeuille de clientes privilégiées vers qui il se déplace lorsqu'il a des articles qui pourraient les intéresser.

Il est revenu la semaine d'après, et je lui ai acheté deux robes que j'ai trouvées particulièrement jolies. J'ai maladroitement essayé de négocier au niveau du prix et puis ma nature expéditive m'a rattrapée. J'ai fini par les prendre pas très loin du prix taxé, mais à un prix toujours plus intéressant que celui des boutiques huppées d'Akwa qui s'approvisionnent aussi... chez lui. C'est ainsi que s'est tissée une relation d'affaires. Il savait à peu près le type de vêtements qui me plaisait, et m'envoyait régulièrement des whatsapp chaque fois qu'il y avait un arrivage susceptible de m'intéresser. Lorsque mon attention était piquée, je l'invitais à passer au bureau et je prenais ce qui m'intéressait, en le dédommageant pour son déplacement.

Ca a duré environ six mois, et puis du jour au lendemain, Alino, comme on l'appelait, a cessé de m'envoyer des messages. N'étant pas une acheteuse compulsive, je ne l'ai cherché qu'une fois, après quelques mois, mais sa réponse a été molle et il n'est pas venu au bureau comme d'habitude. Six autres mois sont passés. Ma collègue, qui habitait dans le même quartier de lui, m'a signalé qu'elle ne savait pas où il était passé, mais qu'elle continuait à voir ses enfants de temps en temps dans le quartier.

Nous voici rendus en Décembre 2017, plus d'un an après la dernière fois que j'ai vu Alino.

Aujourd'hui, j'ai été informée qu'il est mort en Libye. Les derniers reportages de CNN et le retour des migrants organisés par les autorités camerounaises ont permis à sa famille de prendre des renseignements auprès de ceux qui l'ont croisé là bas.

Alino est mort noyé dans l'eau, lorsque l'embarcation qui le transportait a chaviré. Je n'étais pas particulièrement proche de lui, mais j'ai pensé au type de personne qu'il était, très battant et débrouillard, prêt à tout pour gagner sa pitance et s'occuper de ses enfants. Et je me suis rappelé qu'il y avait certains "bien-pensants" dont la réaction avait été de fustiger les "paresseux" qui refusaient de se battre au Cameroun et préféraient sacrifier leur vie sur des chemins tortueux dans l'espoir d'atteindre l'eldorado européen, au lieu de "travailler".

Alino était marié. Quelques mois avant son départ, son épouse a pris la route et est arrivée en Italie, en passant par cette même Libye. Elle a commencé à se débrouiller et à envoyer de temps en temps un peu d'argent pour aider son mari qui est resté avec les enfants. Ces euros ont été une véritable aubaine mais ils étaient loin d'être suffisants, dans une famille où tout le monde était dans la pauvreté, et où la moindre maladie était synonyme de mort. Alino se débrouillait, de toutes ses forces, mais c'était loin d'assurer la présence d'un repas dans le plat de ses enfants chaque jour, avec les agents des impôts qui ne manquaient pas de le racketter à l'occasion. Alors, ils ont décidé ensemble, qu'il était préférable qu'Alino laisse les enfants à la grand mère, et qu'il la rejoigne, pour qu'ensemble ils continuent à se battre pour sortir définitivement leur famille de la misère.

A-t-il évalué les risques avant de se mettre en route? Certainement. L'a-t-il fait parce qu'il refusait de se battre au Cameroun, où était trop paresseux pour retrousser les manches? Non. Alino était debout tous les jours à cinq heures, pour être le premier au déballage, travaillait parfois jusqu'à la tombée de la nuit, pour s'occuper de sa famille.  Mais c'était clairement insuffisant pour mettre sa famille à l'abri du besoin, et surtout, il ne voyait pas le bout du tunnel. Alors il a préféré mettre sa vie en jeu, pour rejoindre un environnement où l'espoir semblait permis pour lui. Et il y a laissé sa vie.

Je pense à tous ces bienheureux qui ont eu la chance de naitre avec plus de chances que d'autres, et qui se sont permis à la suite des reportages de CNN de porter des jugements hâtifs sur les motivations de ces différents migrants. Le fait que certains aient vu la mort, et soient prêts à repartir une fois la cagnotte reconstituée devrait plutôt nous interpeller : qu'est devenu le Cameroun pour que nos frères camerounais soient prêts à affronter l'enfer pour en sortir? Sont-ils tous vraiment les rêveurs, naifs, paresseux que certains ont décrits? 

Paix à l'âme d'Alino et de tous ces autres à qui on a enlevé l'espoir.

2 commentaires:

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  2. Ce récit me met un baume au cœur, pensée à Isabelle Mpouma qui a été traitée de tous les noms. Je ne la connaissais pas, et vu que je fais partie de ces bienheureux qui n’ont jamais manqué de rien et qui vivent en Occident, il y avait peu de chance qu’on se croise. Et pourtant j’ai mis une semaine avant de me remettre de sa mort tragique.

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