mercredi 19 février 2014

Vive ma bonne

Messieurs les boys and girls, je vous salue!

Aujourd'hui Mercredi 19 février 2014.

Il fait vraiment chaud dans la ville de Douala. Le soleil a sorti tous ses rayons et frappe le crâne des camerounais avec intensité. Cela n'empêche pas nos amis les bendskins de continuer à chercher leur pain quotidien, juchés derrières leurs motos, sans protections contre le méchant astre qui brille haut dans le ciel. Tu dors, ta vie dort et tes marmites dorment aussi.

Malgré le soleil qui n'a pas manqué de me braiser lorsque j'ai pointé le nez hors de mon bureau, je suis particulièrement contente parce qu'en plus d'être un jour spécial pour moi, on vient de m'annoncer un férié demain. Cinquantenaire de la réunification, il a dit. Ah sacré président, il sait vraiment comment faire plaisir à son peuple!!!! Que de fériés... Du coup, je savoure déjà à l'avance les instants de repos (fainéantise?) qui se profilent et je décide de rédiger ce petit billet pour faire honneur à celle grâce à qui jour de repos signifie jour de repos pour moi : ma domestique!

Dans ce grand pays, qui dit jour de repos, dit vraiment jour de repos, et ce grâce aux domestiques. Ce qui est honteux, c'est quand on réalise que ces domestiques sont en réalité payés une misère et qu'ils ont appris à s'en contenter.

En Occident, les jours de repos n'en sont jamais réellement... Machine à faire tourner, courses à faire, ménage général, repassage, etc, etc... Il faut tout faire soi même généralement, sauf quand on a percé et qu'on a les moyens de payer un domestique à temps plein. Et là, ce ne sont pas les histoires du SMIC camerounais à hauteur de 28.000 francs CFA hein... Si vous rencontrez une nounou conventionnée qui garde trois enfants à domicile par exemple, les amis, respectez ses poches...

D'ailleurs, il y a des fériés et des ponts par ci, par là, mais que le président décide 48h avant d'offrir une journée off à tout son pays? Un fantasme irréalisable. Tous les industriels auraient déjà crié au scandale et déploré leur manque à gagner si il venait à l'esprit de leur chef d'état de geler l'économie un jour entier pour fêter un évènement dont ils n'ont rien à foutre. Non pas que je néglige la réunification hein, mais à vrai dire, en ce qui concerne la raison de nombreux fériés....

Imagination Spongebob : On S'en Fout Complètement, - by Anonymous

Ne faîtes pas genre, je sais qu'on tcha les fériés sans trop se poser de questions : vacances njôh!!!


Paresseuses modèles 1Vous vous demandiez pourquoi je suis rentrée au Cameroun, au delà d'un certain masochisme? Voilà une raison valable. J'aime bien qu'on me facilite la vie et au Cameroun, tu n'as pas besoin d'être riche pour te payer les services de quelqu'un qui va te décharger des tâches les plus pénibles de la maison. Bon, si vous avez une théorie sur la femme africaine hein, prenez à gauche là bas, au champ. En plus, je contribue à la diminution du chômage dans ce fichu pays, hein.
Un jour aussi, Paul Biya se félicitera de l'emploi d'un million de boys et bonnes, même si pour l'instant les benam ont toute son attention....

Je disais donc, que je contribue moi aussi à la diminution du chômage au Cameroun, comme de milliers d'autres cadres qui ont des boys, bonnes, chauffeurs, jardiniers, blanchisseurs et consort.

Bon, c'est grave si l'employé en question n'est pas déclaré, ne connaît pas les joies de la sécurité sociale ni la route qui mène à la CNPS? C'est grave si le mot retraite ne veut rien dire pour lui et qu'il est un peu obligé de travailler jusqu'à ce que son corps le trahisse, au risque de ne plus avoir de pitance?  Pire que tout, c'est grave si ils sont payés trente mille, quarante mille, ou cinquante mille, une somme qui ne leur permet certainement pas de vivre correctement?... Avec ça, ils doivent se battre tous les jours dans leurs foyers pour avoir quelque chose, peu importe quoi, et remplir les panses. Avant de songer à lutter contre la mal-nutrition, occupons nous déjà de la sous-nutrition, ok?

En fait, je m'inquiète de savoir comment ces domestiques joignent les deux bouts, en vérité.
Connaissez vous le prix du kilo de viande?
Le prix du poisson?
Du litre d'huile?
Si oui, alors vous ne devez pas ignorer qu'en fait manger du poisson ou de la viande est un luxe pour de nombreux camerounais. Malheureusement je ne peux pas verser plus que ma domestique ne reçoit (car mes deux bouts à moi sont aussi éloignés l'un de l'autre), mais j'ai mal car elle m'instruit chaque jour un peu plus sur les réalités du Cameroun.

Plutôt que de descendre les camerounais, parler de la mauvaise mentalité, de la corruption, du vol et consort, je pense qu'on ferait mieux de commencer à louer le courage de tous ces hommes et femmes qui se battent tous les jours dans ce pays où les chances ne sont pas offertes à tous. Saluez la persévérance de votre bonne qui vous cuisine de bons repas tous les jours quand elle n'a aucune idée de ce que ses enfants à elle mangeront le soir. Saluez le courage de ce bendskin qui risque sa vie tous les jours sur les routes pour 1000, 2000 francs à la fin de la journée, qui lui permettront de maintenir la tête hors de l'eau. Saluez la disponibilité de votre chauffeur qui ne compte pas ses heures. Saluons tous ces camerounais qui travaillent, pour des salaires qui ne leur permettent pas de s'en sortir réellement.  Et malgré tout ça, ce pays n'a pas encore explosé dans une guerre sans fin.

Du coup, je comprends -je n'excuse pas- les petits larcins. Si vous avez une domestique qui a un enfant en bas âge, ne soyez pas trop choqué si de temps à autre, un yaourt disparait de votre frigo, si vous avez l'impression que le riz en stock a un peu diminué. Tant que ça reste raisonnable, ne vous en formalisez pas. Je pense même qu'il est mieux de prendre soi même l'initiative de donner lorsqu'on voit qu'on a un petit surplus.Parce qu'en réalité, c'est difficile, très difficile. Ne profitez pas du fait d'être des privilégiés pour faire semblant de ne pas voir à quel point les choses vont mal dans ce pays.

Et surtout n'oubliez jamais de dire merci, au lieu de leur cracher dessus et de les traiter de façon inhumaine à cause des miettes que vous leur donnez tous les mois. Car si ils avaient eu une autre possibilité, ils ne seraient certainement pas là à faire des tâches ingrates rémunérées de façon encore plus ingrate.

Merci Ma'a Véro en tout cas (elle ne lira jamais ceci, mais elle appréciera un farotage).
Bon férié à vous!



2 commentaires:

  1. Bonjour JD,
    Je lis vos posts avec beaucoup de plaisirs étant une ancienne mbenguiste qui a fait le pari fou de rentrer au camer après ses études sup.
    Cet article décrit très bien la réalité de la vie des employés de maison (dire domestique me fait un peu bizarre, on dirait des animaux, loll!) dans notre pays pour ne parler que d'eux. C'est pourquoi je n'hésite pas à "faroter" la mienne quand mes poches me le permettent en plus de son salaire.
    Encore merci pour vos articles.

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    1. De rien!
      Moi aussi dès que je peux, je n'hésite pas à la dépanner un peu. Mais autour de moi, on me trouve "trop gentille" et trop souvent on brandit le spectre "trop bon, trop con". Mais qu'à cela ne tienne, je prefere filer des coups de pouce à des personnes qui me rendent autant service. La vie n'est pas du tout facile pour eux.

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